LES ENTRETIENS DE FIGEAC 2017 : RECOMPOSITION POLITIQUE OU FIN DES PARTIS POLITIQUES ?
16.08.17
L’eviction dès le premier tour des deux partis qui ont dominé la vie politique française depuis 60 ans, l’importance du vote en faveur de l’extreme droite et de la gauche radicale, le taux elevé de l’abstention et l’élection d’un President que personne n’attendait peu de temps avant ont révélé une volonté de transformation de la vie politique française.
« Rien ne s’est passé comme prévu ».
MONIQUE CANTO SPERBER, ancienne élève de l’Ecole Normale Supérieure, agrégée de philosophie, ancienne directrice de l’Ecole Normale Supérieure et Presidente jusqu’en 2014 de la Fondation Paris Sciences et Lettres, animait la discussion .
Sommes nous face à une situation exceptionnelle ou une nouvelle donne politique ? Que reste t’il de nos partis politiques ? Quelle est la légitimité présidentielle après une telle élection ?
CYRIL LEMIEUX, sociologue et directeur d’études et maitre de conférence à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales ouvrait le débat.
Comment comprendre la crise qui touche le socialisme en France mais aussi partout en Europe ? On assiste à une montée de l’extreme droite et à un affaiblissement des partis socialistes, ce qui semble lié.
Pour lui, si le parti socialiste est en crise, l’aspiration socialiste n’est en revanche pas prête à disparaitre.
Le parti socialiste doit pour se renouveler, faire barrage au nationalisme réactionnaire et à l’ultralibéralisme .La transformation de la société n’a pas été assez comprise. Les dirigeants des partis socialistes n’ont pas eu les bons outils intellectuels pour comprendre la société française. Le lien ne se fait plus entre le parti et les idées.
Pour sa refonte le parti socialiste devra envisager l’Europe en privilégiant l’éducation et l’écologie, en renouant avec la recherche en sciences sociales.
Par ailleurs l’Etat devrait accroitre la participation politique de groupes d’experts citoyens, par exemple pour étudier la question des perturbateurs endocriniens.
ALAIN-GERARD SLAMA ancien elève de l’Ecole Normale Supérieure, licencié d’histoire, agrégé de lettres,diplomé de l’Institut d’Etudes politiques de Paris (IEP)… chroniqueur au FIGARO, avec la verve qui le caractérise a expliqué à quel point la Démocratie aujourd’hui est fragilisée car ses règles de fonctionnement n’ont pas été respectées. Les partis politiques sont là pour organiser une logique. Les partis auraient du faire leur « ménage ». On rêverait d’assembler la droite et la gauche mais cela ne marche pas et mène à l »extreme centre » . Le mouvement en marche est pour lui le symptôme de la crise qui partout en Europe traverse la Démocratie et s'explique, par le déclin des idéologies et par l'usure, voire la corruption des partis, mais aussi par la pression des demandes de sécurité et de régulation qui conduisent le pouvoir à privilégier les résultats immédiats et à confondre le gouvernement d'une nation avec la gestion d'une entreprise.
On assiste à un phénomène de majorité "introuvable" actuellement, or, un tel refus de choisir entre droite et gauche rend quasi impossible l'alternance, qui sanctionne la responsabilité du politique et qui est « le coeur battant de la démocratie ».
SANDRA LAUGIER, agrégée de philosophie, après des Etudes à l’Ecole Normale Supérieure puis a Harvard et Paris IV , chroniqueuse a LIBERATION , a exposé ensuite son engagement dans la campagne de BENOIT HAMON et l’intérêt qu’elle y a trouvé. Pour elle cette campagne a donné un sens à l’engagement individuel , aux citoyens acteurs qui aux quatre coins de la planète sont descendus dans la rue pour demander une « démocratie réelle ».
Les citoyens ont l’impression, partout dans le Monde, de ne pas être représentés « pas en notre nom » (Brexit, élection de Trump..) et aspirent a un idéal démocratique .
Il faudrait se demander ce qu’on entend par « démocratie » ? Inventer des manières d’agir, chercher un autre monde possible. En ce sens le mouvement « en marche » a souhaité l’émergence dans la vie politique de nouvelles personnes (« dégagisme ») avec une montée de la société civile, comme aux Etats Unis.
C’est le rejet d’une vie politique imposée d’en haut.
Apres ces brillantes interventions , le public des ENTRETIENS, très enthousiaste , a posé de nombreuses questions.
MONIQUE CANTO SPERBER, a clôturé le débat avec de nouvelles pistes de réflexion.
Comment comprendre la présente injonction de réussite et le consensus actuel ? Faut il se préoccuper du manque d’opposition ou de l’opposition reléguée aux extrémistes ? Quelle forme prendra le besoin de contre pouvoirs ? La virtuosité à juxtaposer des contraires peut poser problème…. peut on aller vers un libéralisme social ?
Le public des ENTRETIENS DE FIGEAC passionné attend avec impatience la prochaine édition et se permet meme de rêver à la création de deux séances par an ….
Laurence DUFFOUR